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Centre international de formation à l'enseignement des droits de l'homme et de la paix

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Les séminaires d'experts

Rapport de la 3e réunion internationale d’experts sur l'éducation aux droits de l'homme

Genève, du 12 au 16 décembre 2007

Thème
Diffusion du droit et participation à l’EPU du Conseil des droits de l’homme
Rôle des acteurs de la société civile et de l’éducation

 

 

Table des matières | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8

Acteurs, pouvoirs et tensions

L’École obligatoire, de type occidental, en tant qu’institution sociale et lieu de formation, possède une double identité. D’une part, elle prolonge la société en son sein par les valeurs que celle-ci lui demande de transmettre. De l’autre, elle met en scène des acteurs qui, par leurs statuts respectifs, s’inscrivent dans des rapports d’autorité. Dans ce contexte, les tensions sont inévitables. Comment prendre la mesure de celles-ci et, surtout, comment bien les gérer dans le respect des droits et obligations de chacun ? À cet égard, le Prof. François Audigier, de l’Université de Genève, nous place devant une alternative : soit que les tensions sont apaisées par la priorité donnée au vivre ensemble, soit que l’École privilégie la piste de l’éducation politique et juridique, c’est-à-dire celle qui s’inscrit dans la compréhension des relations de pouvoir. À la vision jugée un peu molle de la première, le didacticien semble pencher surtout en faveur de la seconde, celle qui s’accompagne d’une éducation aux droits.

Évoquant d’autres oppositions, le chercheur pose que l’éducation aux droits se fonde elle-même sur des choix, pas toujours faciles à déterminer. Par exemple, quelles places respectives accorder aux relations entre droits et obligations des élèves et droits et obligations des adultes ? Cette éducation doit-elle privilégier les expériences ou les savoirs ? Doit-on se centrer sur des « situations chaudes qui divisent nos sociétés », au risque de « conflictualiser » l’École, ou bien de choisir des situations qui permettent des mises à distance ? Doit-on opter pour la loi, la même pour tous ou plutôt le contrat conclu entre deux parties – au risque d’instituer des inégalités entre les parties ? Devait-on, enfin, fonder l’intervention sur la base d’appartenances héritées ou sur celle qui pose que nos appartenances sont changeantes parce qu’elles se veulent libres ?

Bien qu’en général, l’éducation aux droits soit subordonnée à l’éducation à la citoyenneté, elle rend néanmoins possible une « réflexion entre les expériences scolaires et les rencontres du droit », nous dit F. Audigier. Cette réflexion peut, entre autres, porter sur l’organisation de la vie scolaire (élèves confrontés à des pratiques, textes et règles de vie qui font référence au droit). Cet exercice peut également porter sur des dispositifs de participation (de conseils d’élèves, à l’action somme toute très souvent limitée, jusqu’à la pédagogie Freinet qui repense l’ensemble de l’organisation scolaire en passant par une participation plus active des élèves à l’édiction des règles de l’établissement, comme l’a souligné la Dr. Véronique Truchot lors de son intervention).

Mme Truchot a fait remarquer, qu’en matière de relations de pouvoir entre les adultes et les jeunes, la légitimité de l’autorité occupe une place centrale en matière de représentations des règles à l’école. Selon la chercheuse, cette légitimité - institutionnelle - devrait reposer sur le principe d’égalité et la participation des élèves au processus d’élaboration des règles. Dans sa thèse consacrée aux représentations des jeunes de la règle scolaire, elle montre bien qu’aux yeux de ces derniers, la légitimité de l’autorité de l’enseignant dépend fortement de la cohérence des pratiques enseignantes au regard de la mission de l’école et des relations fondées sur le respect mutuel.

Pour que, dans le cadre de l’éducation scolaire, le droit soit appliqué sans exclusives, Mme Truchot suggère quelques repères pour l’action. Le premier est l’égalité en droits. Faisant état d’une recherche conduite par Groupe européen de recherche sur l’équité des systèmes éducatifs (GERESE), la chercheuse souligne que le pourcentage d’élèves traités avec justice diminue fortement quand on leur demande s’ils sont d’accord avec les affirmations : « Les professeurs respectent tous les élèves » et « Les professeurs ne marquent pas de préférence entre les élèves ». Le deuxième repère est celui de la participation des élèves aux règles scolaires. Celle-ci est-elle « authentique » ou ne traduit-elle qu’un simulacre de démocratie ? Il en va de la crédibilité de l’institution et de la confiance que les jeunes peuvent leur témoigner. Le troisième repère est celui de l’autorité. Celle-ci, selon Mme Truchot, bien qu’indispensable pour enseigner et requise sur le plan de la socialisation, ne peut toutefois pas faire l’économie de l’examen critique des relations de pouvoir qui sont au cœur des tensions inhérentes à l’inégalité de statut de l’enfant et de l’adulte. Face à l’adversité que constituent les rapports de pouvoir dans une relation qui se caractérise par l’asymétrie, poursuit-elle, le recours au droit semble prometteur. En tout état de cause, nous dit V. Truchot, il faut éviter de tomber dans l’excès de règles qui repose sur une anticipation des comportements disruptifs. C’est l’image d’une enfance et d’une adolescence dangereuses pour l’équilibre social qui se voit ainsi confortée. Le dernier repère est le respect. Qu’en faut-il entendre ? À cet égard, la chercheuse rappelle que les élèves interviewés voudraient voir régner un climat de confiance et de négociation qui permettrait de garantir de bonnes relations entre eux et les enseignants. La relation à laquelle ils aspirent repose sur une autorité ferme, mais librement consentie et exercée dans le respect de chacun.

L’introduction du droit dans l’école et, son corollaire, la formation du citoyen, s’inscrivent dans un large débat sur l’autorité dont certains annoncent même la fin. La proclamation de l’égalité juridique de tous les humains est venue mettre fin à une vision archaïque des rapports de pouvoir. Désormais, c’est d’une « autorité qui autorise », pour employer une expression devenue populaire dans les milieux de l’éducation, avec laquelle pourrait à avoir à composer rapidement l’École, malgré les réactions des nostalgiques du passé qui s’agrippent à une vision dépassée du pouvoir.

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