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Centre international de formation à l'enseignement des droits de l'homme et de la paix

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Dossiers du CIFEDHOP 2001 - Le dialogue des cultures
L’éducation aux droits de l’homme contre le racisme et pour l’apprentissage du vivre ensemb
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Le racisme : le comprendre et le combattre. Quelques points de repères par Jean Hénaire

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III. Trois modèles d’enseignement de l’histoire et de la géographie


Plusieurs enseignants, chercheurs et analystes de l’éducation se sont penchés sur des modèles et pratiques propices à l’apprentissage du vivre ensemble et à la découverte des richesses culturelles dont recèle l’humanité. Un bon nombre de travaux réalisés ont porté sur l’enseignement de l’histoire et de la géographie. Ce sont des matières scolaires sensibles qui peuvent tout autant véhiculer des contenus et des valeurs discriminatoires que des idées favorables à la découverte et à la compréhension de l’Autre.

Jean Piaget, à l’époque où il dirigeait le Bureau international d’éducation, avait justement proposé que la communauté internationale s’emploie à réaliser et à diffuser un manuel d’histoire universelle qui mettrait l’accent sur les grandes réalisations de l’humanité. Mais son projet échoua en raison de l’opposition qu’il suscita de la part des États. Plus tard, le fondateur de l’EIP, Jacques Mühlethaler, proposa que l’on révise les manuels d’histoire tant il fut littéralement sidéré de constater que ceux-ci invitaient de par leur contenu à la négation de l’Autre par le nationalisme exacerbé qui s’y manifestait. Cette question est récurrente. Et lors d’un récente réunion d’experts organisée par le Bureau international d’éducation, on se pencha sur la question de savoir comment apprendre à vivre ensemble grâce à l’enseignement de l’histoire et de la géographie (2).

L’enseignement de l’histoire et de la géographie s’inscrirait désormais dans un processus de mondialisation des communications, au sens large du terme (échanges commerciaux, information, immigration, etc.). Cette dynamique modifie par le fait même les représentations quotidiennes de l’espace et du temps. Être chez soi et citoyen du monde en même temps appellerait ainsi à comprendre la continuité qui relie le chez soi et l’ailleurs. Dans la mesure où les programmes d’études de ces disciplines sont du ressort de l’État, il incomberait à ce dernier de jouer à la fois le rôle d’agent interne de cohésion sociale et de promoteur de l’ouverture au monde et de la diversité culturelle.

Pour essayer de comprendre comment l’enseignement de l’histoire et de la géographie peut à la fois contribuer à forger des identités tout en élargissant les perspectives de l’apprentissage de la vie collective, certains ont examiné les modèles dominants de cet enseignement. Ainsi, la documentation recueillie par Bernard Ducret (3), du Lycée Gabriel Fauré, en France, permet de dégager grossièrement trois modèles d’enseignement pour apprendre à vivre ensemble. L’auteur prend le soin de préciser que ces modèles sont différents, voire antinomiques, et qu’on ne peut établir entre eux aucune hiérarchie car ils s’avèrent tous opérationnels dans la société dont ils sont issus et à l’échelle qui leur a été assignée.

Dans le modèle fermé, l’enseignement de l’histoire et de la géographie se préoccupe essentiellement de son propre territoire. L’extérieur est ignoré de manière quasi absolue, l’intérieur fait l’objet d’une analyse approfondie et méticuleuse. Ce modèle s’avère opérationnel en cherchant à inculquer une forte identité régionale ou nationale à des enfants qui ne sont pas forcément originaires de l’espace étudié. Pas ou peu de cas est fait de l’existence des minorités, qu’elles soient linguistiques, religieuses, autochtones ou culturelles telles que prises en compte dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

Il y a aussi le modèle juxtaposé. Ce serait le modèle le plus fréquent. Il se différencierait du modèle fermé en ce sens que le monde étranger est objet d’études. L’histoire et la géographie abordent les pays, les régions, les civilisations les unes après les autres. Ce serait le cas pour la France et, similairement, pour l’Italie, par exemple. Par ailleurs, comme l’observe R. Ferras, de l’IUFM Montpellier, les nouveaux programmes français de géographie proposent différentes échelles de distribution du territoire : locale, régionale, nationale, européenne et mondiale ; le défi consisterait à jeter des ponts entre ces dynamiques spatiales, ce qui amène à débattre notamment de la notion d’"appartenances multiples".

Enfin, il y a le modèle relié. Moins fréquent, souligne-t-on, ce modèle se rencontrerait surtout dans les pays de culture anglo-saxonne. Il s’intéresserait principalement aux acteurs (administrations, entreprises, communautés ethno-linguistiques, individus). On insisterait aussi sur la confrontation des différents points de vue au sein du système-monde. Les approches pédagogiques privilégient les jeux de rôle, les enquêtes, les discussions. L’étude cite l’Irlande du Nord et l’Afrique du Sud comme ayant opté pour ce modèle, pays ayant traversé des tensions violentes. Chez ces derniers, l’adoption d’un modèle fermé ne pourrait qu’induire de la crispation et provoquer d’éventuelles nouvelles confrontations. D’autre part, cette approche ne vaudrait cependant pas pour l’ensemble des pays anglo-saxons ; en effet, selon Norman Graves, de l’Université de Londres, le programme anglais de géographie, par exemple, ne ferait que très laconiquement allusion à la construction de l’Union européenne, ce qui témoignerait du peu d’intérêt, au plan politique, vis-à-vis des formes de citoyenneté transfrontalières et des réalités culturelles Outre-Manche.

Par analogie, on peut rapprocher ces trois modèles présentés ci-haut de celui de la transférabilité des apprentissages proposé par Charles E. Osgood (1962) (4). D’après le psychologue, il y aurait trois niveaux de réaction face aux normes culturelles. Au premier niveau, on considère que ses propres normes culturelles sont normales et naturelles. On percevrait toutes les autres comme étrangères, exotiques et "non naturelles". À un deuxième niveau, on reconnaît le fait que les normes culturelles d’autres sociétés sont également des normes au même titre ses propres normes, mais qu’elles sont autres. Enfin, on reconnaît le caractère relatif et spécifique d’une culture des normes que l’on a. On atteindrait ainsi par le fait même un degré supérieur de réflexion sur soi et sur les autres.

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